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Un gouvernement du NFP sans ministres « insoumis » ? La droite assume de « faire barrage », le camp présidentiel esquive

« J’ai pas bien entendu la réponse. » S’exprimant devant les militants de son mouvement, réunis en université d’été dimanche 25 août près de Valence, le coordinateur national de La France insoumise, Manuel Bompard, a choisi l’ironie pour relayer la question adressée par Jean-Luc Mélenchon au bloc central et à la droite républicaine. La veille, actant le fait que son camp constituait un motif de blocage, le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, avait ouvert la porte à un soutien du parti sans participation à un gouvernement de Lucie Castets, candidate de la gauche à Matignon, pour sommer ses détracteurs de dire s’ils censureraient un tel gouvernement.
Un coup tactique salué par les autres partis membres du Nouveau Front populaire mais qui n’a suscité que très peu de réactions dans le camp présidentiel. Vingt-quatre heures après l’intervention de Jean-Luc Mélenchon, aucun des chefs de file de Renaissance, Horizons ou du MoDem n’avait répondu à l’ancien candidat à l’élection présidentielle. « D’habitude, dès qu’on bouge un doigt ou un orteil, les macronistes ont tendance à sortir tout de suite. Là, on a posé une question, peut-être qu’on va avoir une réponse », a raillé Manuel Bompard pour mettre en évidence le silence de l’ancienne majorité présidentielle.
Dans les faits, quelques députés de Renaissance ont pris la parole pour rejeter le scénario proposé par Jean-Luc Mélenchon, visant le programme du Nouveau Front populaire. « Qui peut être dupe d’une telle manipulation ? », a réagi sur X le député de Paris Benjamin Haddad. « Un gouvernement soumis aux injonctions de Jean-Luc Mélenchon, qui appliquera le programme du NFP-LFI, explosion des impôts et la dépense publique, dirigisme économique, complicité avec les régimes autoritaires, remise en cause de la laïcité : c’est évidemment non ». « Si c’est pour appliquer le programme des “insoumis”, censure en effet », a renchéri le député du Val-de-Marne Mathieu Lefèvre.
D’autres s’en sortent avec une pirouette. « Pas de ministre [de] LFI, pas de propositions [de] LFI dans le programme et plus de LFI à l’Assemblée nationale. Là oui, on commence à être bien… », a ironisé sur X le député du Gers Jean-René Cazeneuve. Mardi dernier, le même Jean-René Cazeneuve affirmait pourtant que les macronistes étaient « prêts à des compromis » avec les socialistes pour « éviter la censure », tout en rejetant par avance « un gouvernement avec des “insoumis” ».
Si la réponse officielle du camp présidentiel se fait attendre, celle du parti Les Républicains (LR) est venue non de l’Assemblée, mais du Sénat. Le chef de file des sénateurs de LR, Bruno Retailleau, a affirmé dès samedi que tout gouvernement de gauche s’exposerait à une motion de censure : « Pour nous, c’est non aux ministres [de] LFI et non à un programme inspiré par LFI. Nous sommes opposés à leur participation à un gouvernement, comme à leurs idées. »
Dimanche, lors de son discours de rentrée, son homologue à l’Assemblée, Laurent Wauquiez, a estimé que LFI était « sans doute le plus grand danger politique pour [le] pays » et a promis de lui « faire barrage », sans se prononcer explicitement sur le principe d’une motion de censure. Même ligne pour Annie Genevard, la secrétaire générale de LR, qui a jugé dimanche sur France Inter que, au-delà des « personnes », c’est le « projet » des « insoumis » qui est « dangereux ».
Le patron du MoDem, François Bayrou, a estimé sur LCI que l’idée d’un gouvernement de gauche sans LFI est un « tour de passe-passe ». Il a justifié son « opposition » au Nouveau Front populaire en raison de son programme, qu’il trouve « dangereux pour le pays ».
Quoi qu’il arrive, les tractations pour Matignon entamées vendredi doivent reprendre lundi à l’Elysée. Emmanuel Macron recevra Jordan Bardella et Marine Le Pen pour le RN, puis Eric Ciotti, ainsi que les présidents du Sénat, Gérard Larcher, et de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet. Pour la suite, rien n’est exclu.
De nouvelles consultations pourraient être organisées mardi, en fonction du résultat de ce premier cycle de discussions, selon l’Elysée, qui n’a pas donné de calendrier pour la nomination d’un chef de gouvernement, alors que celui de Gabriel Attal est démissionnaire depuis le 16 juillet. Autre hypothèse qui circule, le président de la République pourrait s’exprimer lundi, sur un format qui n’est pas arrêté.

Le Monde
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